La loi a prévu le règlement des successions pour les situations classiques. Mais pour beaucoup de familles, il est important de prévoir l’avenir des proches de façon nettement plus fine. Dans ces cas-là, un testament s’impose. Mais il faut se montrer très prudent dans sa rédaction.

C’est un sujet que personne n’a réellement envie d’aborder. Et pourtant, il permet d’éviter bien des désagréments à ceux qui nous sont chers : le testament est un outil précieux. Quelle que soit votre situation, vous avez intérêt à en parler avec votre notaire.

En l’absence de testament, la dévolution légale s’applique

La loi a prévu, pour les situations simples, une répartition des biens qui peut convenir dans beaucoup de familles. Ainsi, en l’absence de testament, les règles qui s’appliquent sont celles de la dévolution légale.

On sert en priorité ceux que l’on appelle les héritiers réservataires, c’est-à-dire ceux qui ont automatiquement droit à une part de la succession.

Si le défunt avait un enfant, il a droit à 50% de l’actif successoral, s’il en avait deux, ils se partagent les deux tiers, et s’il avait trois enfants ou plus, la réserve à partager est des trois quarts du montant de la succession.

Le seul autre héritier réservataire est l’époux, dans les cas où le défunt n’a ni enfant ni parent : il a droit automatiquement à un quart de la succession.

S’il y a un époux survivant, il a un droit viager sur la résidence principale si le défunt en était propriétaire. Il choisit également entre l’usufruit de la totalité des biens, c’est-à-dire le droit d’en disposer et d’utiliser les revenus qu’ils procurent, et un quart de ces biens en pleine propriété. Mais si les enfants du défunt ne sont pas tous des enfants communs, le conjoint survivant ne peut opter pour l’usufruit de 100% des biens : il doit automatiquement prendre 25% des biens en pleine propriété.

S’il n’y a pas d’enfants, le père récupère un quart, la mère un quart, et l’époux 50% (toujours avec un droit viager sur le logement). S’il n’y a pas d’époux, les 50% restants se partagent entre les frères et sœurs du défunt. Et lorsqu’un des parents est décédé, sa part revient aux autres héritiers.

La dévolution légale prévoit donc déjà une répartition toute faite entre les héritiers.

Les situations où la dévolution légale ne convient pas sont nombreuses

Pourtant, elle ne peut pas s’adapter très finement à des situations familiales qui sont parfois complexes. Beaucoup de configurations familiales ne sont pas couvertes par la dévolution légale. Dans ces cas-là, seul un testament peut changer la donne dans la façon dont seront répartis les biens.

Par exemple, le partenaire de Pacs ne fait pas partie des héritiers légaux : avec lui, pas de testament, pas d’héritage. Peu importe que la personne ait partagé la vie du défunt depuis de très nombreuses années, si elle n’est pas désignée spécifiquement dans le testament, elle n’aura droit à rien. Autre cas de figure classique : le défunt souhaite disposer comme il l’entend de la quotité disponible, cette part qui ne revient pas aux héritiers réservataires. S’il souhaite, par exemple, céder cette quotité disponible à des œuvres caritatives, il ne peut le faire qu’au moyen d’un testament. A défaut, la quotité disponible sera répartie entre tous les héritiers légaux.

Un testament permet aussi de mieux équilibrer la répartition entre l’époux et les enfants

Le testament permet aussi d’équilibrer ce qui est transmis entre l’époux et les enfants. Ainsi, dans le cas d’un second mariage, si l’époux récupère le quart de la succession en pleine propriété, et qu’il n’est pas le parent des enfants, l’argent ira à ses propres héritiers. Il ne reviendra pas, in fine, aux enfants du défunt. Pour rectifier le tir, il est possible de décider, par testament, que le conjoint aura droit à la totalité des biens en usufruit. A sa mort, les enfants récupèreront les biens. Attention, cette situation n’est pas idéale pour tous : par exemple, lorsque le conjoint a le même âge que les enfants, il vaut mieux, au contraire, lui laisser un quart en pleine propriété, et réserver le reste aux enfants pendant qu’ils sont jeunes et ont des projets. Enfin, si le conjoint est déjà richement pourvu et que les enfants connaissent des difficultés, il est tout à fait envisageable de priver l’époux de tout, y compris de son droit viager au logement. Mais pour diminuer les droits du conjoint, il faut obligatoirement un testament authentique.

Un testament évite parfois les conflits familiaux

Avec un testament, il est aussi possible de choisir la façon dont sont répartis les biens, et d’éviter les conflits entre les enfants. Par exemple, si tous ont envie de recevoir la maison de vacances et que personne ne souhaite récupérer la résidence principale, le testateur tranche lui-même. A l’un, l’appartement en ville, à l’autre, la maison de campagne, au troisième, les liquidités. Et il n ‘y aura pas de contestation possible. Cela permettra d’éviter les déboires d’une indivision mal gérée.

Autre cas de figure, plus rare : un testament permet de reconnaître un enfant à titre posthume. Ainsi, la famille légitime ne découvre son existence qu’après le décès, mais l’enfant a les mêmes droits dans la succession que tous les autres.

Enfin, un testament peut aussi avoir une autre fonction : celle de désigner des personnes qui n’ont rien à voir avec la succession. C’est le cas pour les bénéficiaires de contrats d’assurance vie, qui peuvent être sans aucun lien avec la famille. C’est surtout le cas lorsqu’il s’agit de désigner une personne de confiance. Le testament est ainsi un passage obligé lorsqu’un adulte se retrouve seul avec la garde de jeunes enfants. Grâce au testament, il n’y aura aucune ambiguïté sur les personnes chargées de recueillir ses enfants s’il lui arrive malheur.

Le risque : un testament non valable

Attention toutefois. Un testament, c’est bien, mais un testament valable, c’est mieux ! Il existe trois sortes de testaments : le testament olographe, écrit, daté et signé de la main du testateur. Le testament authentique, qui est effectué chez le notaire, soit en présence de deux témoins soit en présence d’un autre notaire. Enfin, la troisième forme possible est le testament mystique. Ce dernier est remis au notaire sous pli clos, cacheté et scellé, et ne sera connu qu’après le décès. Il présente un risque majeur : celui d’être nul, parce qu’il n’a pas été revu par le notaire et ne remplit pas toutes les conditions de validité.

Même avec un testament olographe, beaucoup d’erreurs sont possibles. Ainsi, les testaments conjonctifs, rédigés et signés par deux époux, ne sont pas valables. Autre source de confusion : deux testaments rédigés à plusieurs années d’écart qui se contredisent, alors que le rédacteur a oublié de mentionner que le document le plus récent révoquait toutes les dispositions antérieures… En cas de doute, on applique la dévolution légale. Avant de rédiger son testament, il faut toujours en parler avec votre notaire : lui seul pourra s’assurer qu’il est valablement rédigé et que les dispositions que vous prenez sont autorisées par la loi.