CRIDON Lyon nous éclaire ici sur l’utilisation des procurations sous seing privé sous forme électronique en droit de la famille avec les articles 1174 et 1175 du code civil.

 

1. Règles spécifiques tenant à la signature électronique

Sur cette question précise, nous vous invitons à lire l’article de Matthieu Seyfert sur la signature électronique paru aux Cahiers du Cridon (Cahier n° 82, 22 oct. 2018).

1.1. Un écrit ne vaut acte juridique que s’il est signé.

En vertu de l’article 1367 du Code civil, la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique :

  • identifie son auteur,
  • manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte.

Cet article précise : « lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat ».

Concrètement, la signature électronique se présente sous la forme d’un fichier informatique appelé certificat comprenant non seulement des données propres à identifier son propriétaire mais également une clé algorithmique avec laquelle le document sera chiffré, ce qui permettra alors de préserver l’acte de toute altération frauduleuse.

Ex. : la clé real dont dispose aujourd’hui chaque notaire titulaire, est un certificat informatique constituant une signature électronique. A contrario, l’image scannée d’une signature manuscrite ne constitue absolument pas une signature électronique au sens de l’article 1367. En effet, il est impossible de garantir que son apposition sur le document, effectuée au moyen d’un simple copier-coller, résulte bien de son auteur.

1.2. La fiabilité de la signature électronique générée relève de l’appréciation souveraine des juges du fond et c’est à celui qui veut prouver contre le signataire de l’établir.

Lorsque cette preuve est rapportée, la signature utilisée doit être regardée comme étant totalement efficiente, ce quand bien même celle-ci ne serait pas « sécurisée » au sens du décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 ou « qualifiée » au sens du décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017 et du règlement européen eIDAS n°910/2014 du 23 juillet 2014.

Les parties ont toutefois intérêt à utiliser une signature électronique qualifiée dans la mesure où celle-ci bénéficie alors d’une présomption de fiabilité.

« La fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique qualifiée.
Est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement susvisé et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement ». (Décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017, art. 1)

1.3 L’article 1er du décret du 28 septembre 2017 définit la signature électronique qualifiée comme :

  • une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement susvisé,
  • créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifiée répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement,
  • qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.
  • Une signature électronique avancée conforme aux dispositions de l’article 26 du règlement eIDAS doit satisfaire cumulativement aux exigences suivantes :

    • –  être liée au signataire de manière univoque ;
    • –  permettre d’identifier le signataire ;
    • –  avoir été créée à l’aide de données de création de signature électronique que le signataire

      peut, avec un niveau de confiance élevé, utiliser sous son contrôle exclusif ;

    • –  et être liée aux données associées à cette signature de telle sorte que toute modification

      ultérieure des données soit détectable.

    • Un dispositif de création de signature électronique qualifié. Il s’agit, suivant l’article 29 du règlement, d’un dispositif obéissant aux spécifications détaillées à l’annexe II de celui-ci, ci-après reproduite.
    • Un certificat qualifié de signature électronique : il s’agit du fichier informatique valant signature électronique. Comme le précise l’article 28 du règlement eIDAS, celui-ci doit, pour être reconnu comme étant qualifié, répondre aux exigences énumérées à l’annexe I.

En pratique, pour s’assurer du caractère qualifié d’une signature électronique, il convient :

  • De vérifier que celle-ci a bien été fournie par un prestataire de services de confiance qualifié dont la liste est établie et contrôlée, en France, par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes de l’information (ANSSI)
  • De ce que ces spécifications respectent bien les critères fixés à ce titre par le règlement eIDAS (un prestataire peut en effet proposer différents process dont seuls certains sont susceptibles d’être regardés comme étant qualifiés).

2. Règles spécifiques tenant à l’acte électronique

En vertu de l’article 1366 du Code civil, « l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité ».

Il faut pouvoir imputer avec certitude l’acte à un contractant nettement identifié et les procédures techniques de création et de conservation de l’acte doivent garantir que le contenu voulu par les parties n’a pas été altéré entre le moment de sa rédaction et celui de sa signature.

Autrement dit, le texte pose le principe d’égalité entre l’acte électronique et l’acte dressé sur support papier, sous réserve d’utiliser un procédé garantissant à la fois :

  • l’identification fiable des personnes y intervenant,

  • la conservation de l’acte et de son intégrité.

Les articles 1174 et 1175 du Code civil posent ensuite des règles spécifiques pour les contrats conclus sous forme électronique lorsqu’un formalisme particulier est requis au titre de la validité de l’acte :

C. civ., art. 1174

Lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un contrat, il peut être établi et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1366 et 1367 et, lorsqu’un acte authentique est requis, au deuxième alinéa de l’article 1369.
Lorsqu’est exigée une mention écrite de la main même de celui qui s’oblige, ce dernier peut l’apposer sous forme électronique si les conditions de cette apposition sont de nature à garantir qu’elle ne peut être effectuée que par lui-même.

C. civ., art. 1175

Il est fait exception aux dispositions de l’article précédent pour :
1° Les actes sous signature privée relatifs au droit de la famille et des successions, sauf les conventions sous signature privée contresignées par avocats en présence des parties et déposées au rang des minutes d’un notaire selon les modalités prévues aux articles 229-1 à 229-4 ou à l’article 298 ;
2° Les actes sous signature privée relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession.

En pratique, il faut retenir que :

  • Quel que soit le formalisme requis pour la validité de l’acte, ce dernier peut toujours être établi sous forme authentique électronique, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 1369 du même code.
  • Lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un contrat, il peut être établi sous seing privé sous forme électronique, à l’exception :

    Des actes sous signature privée relatifs au droit de la famille et des successions, sauf les conventions sous signature privée contresignées par avocats en présence des parties et déposées au rang des minutes d’un notaire selon les modalités prévues aux articles 229-1 à 229-4 ou à l’article 298 ;

    Des actes sous signature privée relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession.

3. Les procurations : formes et supports

 

La suite du document est accessible ici.

A noter : article publié avec l’autorisation du CRIDON Lyon, que nous remercions ici.