Une succession peut se révéler un cadeau empoisonné, surtout si le défunt avait beaucoup de dettes. Même lorsque cela n’est pas le cas, certains héritiers considèrent qu’ils n’ont besoin de rien et préfèrent que les biens soient directement transmis à leurs enfants. Une solution qui peut être avantageuse sur le plan fiscal.

La loi autorise à renoncer à sa qualité d’héritier. Lorsque le défunt avait beaucoup de dettes, il est important, avant d’accepter la succession, de s’assurer que l’actif est plus important que le passif. Dans le cas contraire, il faudra renoncer. Car il est malheureusement impossible de choisir une partie des biens seulement, et encore plus impossible d’accepter l’actif sans se voir transférer le passif…

Avant toute chose, en cas de doute et en l’absence de documents, il faut prévenir le notaire que des dettes importantes risquent de se faire jour. Il fera alors des recherches, interrogera le greffe du commerce et les banques, ainsi que le département et les caisses de retraite, car certaines aides sociales sont récupérables sur la succession.

Pendant toute la période où le notaire dresse l’état des forces et des charges, il faut se garder d’accepter la succession. Même dans l’acte de notoriété, il est important de mentionner qu’on reconnaît être héritier, sans toutefois se prononcer sur l’acceptation, ou non, de la succession.

Attention au piège de l’acceptation tacite de succession

Pris à la gorge, certains héritiers tombent parfois dans un piège : ils acceptent tacitement la succession, sans en avoir conscience. Comment ? Tout simplement en vendant un bien du défunt, comme une voiture ou un meuble, pour tenter d’éponger une partie de ses dettes. Cela revient, aux yeux de la loi, à se déclarer l’héritier de cette voiture ou de ces meubles, et donc à accepter l’intégralité de la succession, y compris les dettes. Il faudra donc veiller à ne surtout pas s’approprier le moindre bien du défunt tant que la procédure de succession n’a pas été clôturée. En revanche, le fait d’acquitter certaines dettes très urgentes ou de payer les frais funéraires ne sera pas considéré comme portant acceptation de la succession.

Lorsqu’il est établi que la succession comporte malheureusement des dettes plus importantes que l’actif, il faut notifier le refus de succession. Il y a deux façons de procéder : soit l’héritier télécharge un formulaire de renonciation à succession sur le site www.service-public.fr, et dépose le document signé au greffe du tribunal du lieu où s’est ouverte la succession. Soit il se rend chez son notaire, qui reçoit la renonciation à succession, et la transfère au tribunal. En cas de refus de la succession, l’héritier ne récupère donc ni actif, ni passif. Et il n’aura aucun impôt à payer.

En renonçant au profit de ses enfants, on évite une double taxation

Il existe une raison plus réjouissante de renoncer à une succession, c’est la volonté d’avantager ses enfants au moment où l’on perd son père ou sa mère (succession en ligne directe) ou un frère ou une sœur sans enfant (succession en ligne collatérale).

Dans ces successions, l’héritier doit soit tout accepter, soit tout refuser. Lorsque les personnes héritent tard, elles estiment parfois que leurs enfants feront un meilleur usage des biens du défunt. Au lieu d’hériter (en acquittant des droits de succession), puis de faire une donation à leurs enfants (donation qui sera elle aussi taxée ou utilisera tout ou partie des abattements fiscaux), elles permettent à la succession de se faire directement, avec un saut de génération. Ainsi, les biens transmis sont taxés une seule fois, au lieu de deux.

Sur le plan fiscal, l’opération est donc avantageuse. En ligne directe, l’abattement fiscal qui permet de donner ou léguer jusqu’à 100 000 euros par enfant par tranche de quinze ans est conservé. Au lieu d’être utilisé par l’héritier direct, il est partagé entre les enfants qui reçoivent la succession. Par exemple, un père laisse, à sa disparition, un patrimoine de 400 000 euros à son fils et à sa fille. La fille se considère à l’abri des soucis financiers et renonce à sa part au profit de ses deux filles. Les filles reçoivent chacune 100 000 euros, soit la moitié de ce qui devait initialement revenir à leur mère. Elles bénéficient chacune d’un abattement de 50 000 euros et acquittent des droits de succession sur 50 000 euros. Les droits sont calculés selon le barème en vigueur entre parents et enfants.

Cela laisse intacts les abattements fiscaux dont ces deux filles pourront profiter de la part de leur mère, si celle-ci décide, en plus, de leur consentir une donation. Les sommes transmises en franchise d’impôt sont donc nettement plus élevées.

Une autre situation permet d’avantager ses enfants sans renoncer totalement à la succession. C’est celle dans laquelle le premier des époux meurt, en ayant consenti une donation au dernier vivant. Dans certains cas, le conjoint survivant a la possibilité, sans pour autant renoncer totalement à la succession, de cantonner ce qu’il reçoit. C’est-à-dire qu’il lui est possible de prélever sur la succession ce dont il estime avoir besoin, et de laisser le restant aux enfants du défunt. Attention, toutes les donations entre époux n’autorisent pas le cantonnement. Si vous envisagez cette solution, il faut vous assurer auprès de votre notaire que cela est possible avec l’acte que vous avez signé, et dans le cas contraire, le modifier.

On peut aussi renoncer à être bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie

Dans une même logique de transmission, il est aussi possible de renoncer à un contrat d’assurance vie au profit de ses enfants. Pour cela, il est important que la clause bénéficiaire mentionne la possibilité pour un bénéficiaire d’être représenté, soit parce qu’il est décédé, soit parce qu’il renonce à sa part dans le contrat. Voilà pourquoi il est fondamental de faire réviser régulièrement la clause bénéficiaire du contrat par le notaire.

Lorsque c’est le conjoint qui est désigné, la renonciation est aussi possible (toujours à condition que cela soit mentionné dans la clause bénéficiaire). Ce geste est recommandé, à condition, bien sûr, d’en avoir les moyens. Si l’époux ou l’épouse a plus de 70 ans, le fait de transférer directement les fonds à ses enfants leur permet de profiter d’un abattement fiscal important. Tandis que si le conjoint survivant, âgé de plus de 70 ans, encaisse lui-même les fonds et les loge sur un autre contrat d’assurance vie, les enfants bénéficiaires ne profiteront pas du tout de la même exonération fiscale.